Educateurs: La guerre des méthodes
Posté : jeu. 31 mai 2018 07:40
Très bon article de Philippe, je publie ici
Educateurs: La guerre des méthodes.
Publié le 27 Mai 2018 par Philippe Roustant
A la suite de la conférence "Dans la tête des chiens" organisée par Nicolas Greveldinger, avec comme co-intervenants Hervé Pupier et Bertrand Beuns, on assiste à des réactions épidermiques de la part des éducateurs exclusivement positifs.
Ceux ci semblent agacés de cette capacité à "montrer" sans violence ,sans collier à pointes, sans collier électrique, des résultats immédiats en rééducation de troubles comportementaux. Résultats rendus possibles par un travail sur l'énergie, le calme intérieur et la rigueur des
demandes faites au chien.
Ils sont frustrés de ne pas pouvoir montrer en vidéo leurs résultats, quand il y en a, en raison de la lenteur avouée de leurs méthodes, centrées sur le contre conditionnement et l'habituation progressive.
Ces techniques peuvent de montrer efficaces à deux conditions:
-Qu'il n'y ait pas de danger potentiel de morsure dans l'environnement du chien.
-Que le propriétaire dispose d'un délai suffisamment long sans être contraint par une décision préfectorale (évaluation de dangerosité importante)et/ ou un emploi du temps par trop contraint.
Ces éducateurs nient toute notion de hiérarchie intra ou inter spécifique. Ils refusent d'imposer un comportement au chien ni même de lui interdire quelque action que ce soit. La seule façon déontologiquement acceptable de faire cesser une action consiste pour eux à ne pas
la récompenser (loi d'extinction selon Pavlov, sous réserve que cette action ne constitue pas en elle même une récompense) et/ou lui proposer un stimulus positif de valeur supérieure aux yeux du chien.
Le problème c'est qu'ils se sont auto attribués un label "Education Positive et Amicale" duquel ils sont prompts à s'exclure les uns les autres à la moindre utilisation d'une longe, d'une cage de transport, d'une laisse , d'un collier...etc...
Qu'ils reprochent aux éducateurs non exclusivement positifs l'utilisation ponctuelle du collier sanitaire ne m'émeut pas plus que cela : Cet outil, quand il est utilisé, l'est pour deux
raisons:
1) Garantir la sécurité de l'éducateur et des spectateurs en cas de réponses agressives pendant les phases de contention du chien.
2) Eviter que le chien puisse sortir la tête et se libérer pour aller agresser un congénère.
Dans les cas de troubles dénués d'agressivité, on peut tout à fait s'en passer au profit d'un collier plat.
Les chiens sélectionnés pour cette conférence présentaient tous , à des degrés divers , des troubles comportementaux plus ou moins aigus
avec des conséquences sur leur qualité de vie et un impact négatif sur leur relation avec leur propriétaire.
Ce choix de sélectionner des "chiens à problèmes" ne doit pas faire oublier que les éducateurs compétents, comme ceux de l'OSDEC, sont à même de réaliser une éducation de base en mode totalement positif avec des chiens ne présentant pas ce type de troubles.
Car on oublie trop souvent que l'apprentissage des ordres de base est facilité par l'utilisation d'un renforcement exclusivement positif comme peut l'être la nourriture. On crée ainsi d'une façon totalement naturelle une mémoire musculaire des positions correctes et on
favorise la discrimination auditive des ordres.
Le renforcement de la relation passe aussi par le jeu et un éducateur digne de ce nom doit pouvoir enseigner les codes du jeu au binôme
maître/chien.
De la même manière la récompense sociale (les félicitations vocales , les caresses) constitue un des apprentissages incontournables de toute séquence d'éducation: Le propriétaire est toujours porté naturellement à reprocher à son chien ses comportements indésirables.
Il a beaucoup plus de mal à lui signifier quand il est satisfait de son écoute et de sa patience!
Mais alors, il n'y aurait donc que l'utilisation d'un dispositif de contention comme différence fondamentale entre les éducateurs exclusivement positifs et ceux appelés, bien improprement, "les tradis"?
Eh bien pas tant que cela!
Les tradis utilisent volontiers une laisse mais cette façon de faire est obligatoire en milieu urbain.
Ils apprennent au chien les comportements de base MAIS aussi les interdits.
La différence fondamentale est ici : Les ultras positivistes se refusent à dire "Non!"
Il y a des cas où cela fonctionne et d'autres non...
Ce n'est pas très étonnant, car peu de personnes ont compris exactement ce qui caractérise la notion de "récompense"
La récompense, c'est: "Ce que désire le plus le chien au moment où il est récompensé!".
Il est des situations où le chien ne désire rien d'autre qu'un morceau de saucisse, une félicitations et une caresse...Il en est d'autres où cela ne suffit plus!
Il y a une conséquence immédiate: le chien est soumis au stimulus le plus fort. Tant qu'on peut lui proposer quelque chose d'une valeur supérieure à ce qu'il convoite, tout fonctionne dans le meilleur des mondes.
Le conditionnement (avec ou sans clicker) vient soutenir cet apprentissage et il existe une catégorie de chiens qui, par nature, fonctionnent très bien avec cette méthode.
Ce sont souvent des chiens timides, assez peu portés vers les comportements exploratoires et qui manifestent facilement des signes de soumission avec les autres chiens et les humains .
Leurs propriétaires ont souvent réalisé un apprivoisement qui leur tient lieu de socialisation.
ils sont généralement d'un tempérament tranquille et doux.
Avec d'autres , c'est plus compliqué. Ils possèdent naturellement des instincts de prédation, de défense, d'agressivité territoriale ou de protection de ressources qui nécessitent un contrôle accru du maître sur leurs actions pour permettre d'éviter les accidents.
Ces chiens ont besoin que leurs maîtres clarifient pour eux les bons comportements à adopter dans certaines situations.
Ce qui est bien et ce qui est mal . Ce qui est blanc et ce qui est noir. Ce qui est autorisé et ce qui est interdit!
Moins on laissera de zones grises dans sa façon d'appréhender les choses du quotidien , plus on le tranquilisera.
C'est pour cette raison qu'il doivent avoir une notion de "devoir" et savoir dans quels cas il n'est pas possible de se soustraire à une demande.
Les chiens qui sont dans l'expectative en raison d'un positionnement hiérarchique flou (le leader étant celui qui protège, qui nourrit et qui fait respecter les règles: défense du territoire, accès à la reproduction, contrôle de la prédation, manipulations, etc...) en sont réduits à être totalement subordonnés à leurs instincts, ce qui peut s'avérer dangereux pour eux et pour les autres.
L'exemple type où on peut visualiser les conséquences de ces deux types d'éducation c'est le rappel:
Sur un terrain clos , il n'y a aucune différence notable entre un chien éduqué de façon uniquement positive (donc qui revient vers son maître par plaisir d'être félicité et de recevoir une récompense) et un même type de chien qui a été éduqué par le même conditionnement
mais en y incluant la notion de "devoir".
Si on passe en milieu ouvert mais sans danger (ex: Une forêt) on n'a plus qu'à espérer que le chien à qui on n'a pas appris le respect de l'interdit ne sente pas un lièvre ou un chevreuil à proximité...(c'est d'ailleurs la première cause d'utilisation du CE par les propriétaires ayant réalisé un cursus d'éducation exclusivement positif.)
l'autre chien sera tenté également mais il sait depuis toujours qu'on ne suit pas forcément le stimulus le plus fort. C'est interdit!
Si on tente la même chose en milieu urbain dans un parc ouvert aux chiens , on court le risque qu'un chien non sensibilisé à l'interdit soit plus tenté d'aller jouer avec un autre chien (voire de l'agresser) que de revenir vers son maître pour recevoir une récompense.
Au moment de choisir un éducateur , ne vous formalisez pas outre mesure sur un label "positif" (et qui le décernerait?Ils ne sont déjà pas d'accord sur la définition!) ou "tradis" (qui , on l'a vu, utilise aussi des méthodes positives).
Concentrez vous plutôt sur le fait qu'il ne se montre jamais violent (ce qui n'inclut pas le fait de se laisser mordre sans réagir!)
et qu'il soit capable de s'adapter à votre chien...
Educateurs: La guerre des méthodes.
Publié le 27 Mai 2018 par Philippe Roustant
A la suite de la conférence "Dans la tête des chiens" organisée par Nicolas Greveldinger, avec comme co-intervenants Hervé Pupier et Bertrand Beuns, on assiste à des réactions épidermiques de la part des éducateurs exclusivement positifs.
Ceux ci semblent agacés de cette capacité à "montrer" sans violence ,sans collier à pointes, sans collier électrique, des résultats immédiats en rééducation de troubles comportementaux. Résultats rendus possibles par un travail sur l'énergie, le calme intérieur et la rigueur des
demandes faites au chien.
Ils sont frustrés de ne pas pouvoir montrer en vidéo leurs résultats, quand il y en a, en raison de la lenteur avouée de leurs méthodes, centrées sur le contre conditionnement et l'habituation progressive.
Ces techniques peuvent de montrer efficaces à deux conditions:
-Qu'il n'y ait pas de danger potentiel de morsure dans l'environnement du chien.
-Que le propriétaire dispose d'un délai suffisamment long sans être contraint par une décision préfectorale (évaluation de dangerosité importante)et/ ou un emploi du temps par trop contraint.
Ces éducateurs nient toute notion de hiérarchie intra ou inter spécifique. Ils refusent d'imposer un comportement au chien ni même de lui interdire quelque action que ce soit. La seule façon déontologiquement acceptable de faire cesser une action consiste pour eux à ne pas
la récompenser (loi d'extinction selon Pavlov, sous réserve que cette action ne constitue pas en elle même une récompense) et/ou lui proposer un stimulus positif de valeur supérieure aux yeux du chien.
Le problème c'est qu'ils se sont auto attribués un label "Education Positive et Amicale" duquel ils sont prompts à s'exclure les uns les autres à la moindre utilisation d'une longe, d'une cage de transport, d'une laisse , d'un collier...etc...
Qu'ils reprochent aux éducateurs non exclusivement positifs l'utilisation ponctuelle du collier sanitaire ne m'émeut pas plus que cela : Cet outil, quand il est utilisé, l'est pour deux
raisons:
1) Garantir la sécurité de l'éducateur et des spectateurs en cas de réponses agressives pendant les phases de contention du chien.
2) Eviter que le chien puisse sortir la tête et se libérer pour aller agresser un congénère.
Dans les cas de troubles dénués d'agressivité, on peut tout à fait s'en passer au profit d'un collier plat.
Les chiens sélectionnés pour cette conférence présentaient tous , à des degrés divers , des troubles comportementaux plus ou moins aigus
avec des conséquences sur leur qualité de vie et un impact négatif sur leur relation avec leur propriétaire.
Ce choix de sélectionner des "chiens à problèmes" ne doit pas faire oublier que les éducateurs compétents, comme ceux de l'OSDEC, sont à même de réaliser une éducation de base en mode totalement positif avec des chiens ne présentant pas ce type de troubles.
Car on oublie trop souvent que l'apprentissage des ordres de base est facilité par l'utilisation d'un renforcement exclusivement positif comme peut l'être la nourriture. On crée ainsi d'une façon totalement naturelle une mémoire musculaire des positions correctes et on
favorise la discrimination auditive des ordres.
Le renforcement de la relation passe aussi par le jeu et un éducateur digne de ce nom doit pouvoir enseigner les codes du jeu au binôme
maître/chien.
De la même manière la récompense sociale (les félicitations vocales , les caresses) constitue un des apprentissages incontournables de toute séquence d'éducation: Le propriétaire est toujours porté naturellement à reprocher à son chien ses comportements indésirables.
Il a beaucoup plus de mal à lui signifier quand il est satisfait de son écoute et de sa patience!
Mais alors, il n'y aurait donc que l'utilisation d'un dispositif de contention comme différence fondamentale entre les éducateurs exclusivement positifs et ceux appelés, bien improprement, "les tradis"?
Eh bien pas tant que cela!
Les tradis utilisent volontiers une laisse mais cette façon de faire est obligatoire en milieu urbain.
Ils apprennent au chien les comportements de base MAIS aussi les interdits.
La différence fondamentale est ici : Les ultras positivistes se refusent à dire "Non!"
Il y a des cas où cela fonctionne et d'autres non...
Ce n'est pas très étonnant, car peu de personnes ont compris exactement ce qui caractérise la notion de "récompense"
La récompense, c'est: "Ce que désire le plus le chien au moment où il est récompensé!".
Il est des situations où le chien ne désire rien d'autre qu'un morceau de saucisse, une félicitations et une caresse...Il en est d'autres où cela ne suffit plus!
Il y a une conséquence immédiate: le chien est soumis au stimulus le plus fort. Tant qu'on peut lui proposer quelque chose d'une valeur supérieure à ce qu'il convoite, tout fonctionne dans le meilleur des mondes.
Le conditionnement (avec ou sans clicker) vient soutenir cet apprentissage et il existe une catégorie de chiens qui, par nature, fonctionnent très bien avec cette méthode.
Ce sont souvent des chiens timides, assez peu portés vers les comportements exploratoires et qui manifestent facilement des signes de soumission avec les autres chiens et les humains .
Leurs propriétaires ont souvent réalisé un apprivoisement qui leur tient lieu de socialisation.
ils sont généralement d'un tempérament tranquille et doux.
Avec d'autres , c'est plus compliqué. Ils possèdent naturellement des instincts de prédation, de défense, d'agressivité territoriale ou de protection de ressources qui nécessitent un contrôle accru du maître sur leurs actions pour permettre d'éviter les accidents.
Ces chiens ont besoin que leurs maîtres clarifient pour eux les bons comportements à adopter dans certaines situations.
Ce qui est bien et ce qui est mal . Ce qui est blanc et ce qui est noir. Ce qui est autorisé et ce qui est interdit!
Moins on laissera de zones grises dans sa façon d'appréhender les choses du quotidien , plus on le tranquilisera.
C'est pour cette raison qu'il doivent avoir une notion de "devoir" et savoir dans quels cas il n'est pas possible de se soustraire à une demande.
Les chiens qui sont dans l'expectative en raison d'un positionnement hiérarchique flou (le leader étant celui qui protège, qui nourrit et qui fait respecter les règles: défense du territoire, accès à la reproduction, contrôle de la prédation, manipulations, etc...) en sont réduits à être totalement subordonnés à leurs instincts, ce qui peut s'avérer dangereux pour eux et pour les autres.
L'exemple type où on peut visualiser les conséquences de ces deux types d'éducation c'est le rappel:
Sur un terrain clos , il n'y a aucune différence notable entre un chien éduqué de façon uniquement positive (donc qui revient vers son maître par plaisir d'être félicité et de recevoir une récompense) et un même type de chien qui a été éduqué par le même conditionnement
mais en y incluant la notion de "devoir".
Si on passe en milieu ouvert mais sans danger (ex: Une forêt) on n'a plus qu'à espérer que le chien à qui on n'a pas appris le respect de l'interdit ne sente pas un lièvre ou un chevreuil à proximité...(c'est d'ailleurs la première cause d'utilisation du CE par les propriétaires ayant réalisé un cursus d'éducation exclusivement positif.)
l'autre chien sera tenté également mais il sait depuis toujours qu'on ne suit pas forcément le stimulus le plus fort. C'est interdit!
Si on tente la même chose en milieu urbain dans un parc ouvert aux chiens , on court le risque qu'un chien non sensibilisé à l'interdit soit plus tenté d'aller jouer avec un autre chien (voire de l'agresser) que de revenir vers son maître pour recevoir une récompense.
Au moment de choisir un éducateur , ne vous formalisez pas outre mesure sur un label "positif" (et qui le décernerait?Ils ne sont déjà pas d'accord sur la définition!) ou "tradis" (qui , on l'a vu, utilise aussi des méthodes positives).
Concentrez vous plutôt sur le fait qu'il ne se montre jamais violent (ce qui n'inclut pas le fait de se laisser mordre sans réagir!)
et qu'il soit capable de s'adapter à votre chien...